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Avez vous besoin d’une détox du foie ?

3 novembre 2024

Il est assez courant de lire dans la presse féminine ou santé ou de se faire prescrire par certains professionnels une “detox du foie” à chaque nouvelle saison, force de compléments alimentaires ou de boissons detox. 

En nous regardant dans le blanc des yeux, en palpant simplement notre ventre ou en regardant notre langue, le diagnostique tombe rapidement “votre foie est surchargé et fatigué” cher(e) madame/ monsieur, je vous recommande une détox hépatique et vous serez en pleine forme !

Différentes cures sont légions dans les grandes surfaces en parapharmacie ou même en ligne, mais sont-elles vraiment nécessaires pour un foie en bonne santé ? 

 

Le rôle du foie 

Le foie est un organe majeur impliqué dans plusieurs fonctions de l’organisme, il exerce les rôles suivant : 

  • Formation et excrétion de la bile nécessaire à la solubilisation des graisses alimentaires 
  • Régulation de la glycémie en participant au stockage et à la  libération du glucose en période de jeûne
  • Synthèse des lipides et sécrétion des lipoprotéines plasmatiques
  • Contrôle du métabolisme du cholestérol
  • Formation de l’urée, de protéines et d’enzymes variées (la sérum-albumine, des facteurs de coagulation…)
  • Acteur majeur du Métabolisme ou désintoxication des médicaments et autres substances étrangères/ xénobiotiques toxiques

Le foie est avec les reins et les poumons un organe permettant l’élimination/ l’excrétion de différentes toxines nocives pour l’organisme. 

 

Sources 

  • https://www.msdmanuals.com/fr/professional/troubles-h%C3%A9patiques-et-biliaires/prise-en-charge-du-patient-pr%C3%A9sentant-une-h%C3%A9patopathie/structure-et-fonction-du-foie

 

Les différentes toxines et la détoxication hépatique

Le corps est exposé quotidiennement à une variété de produits chimiques naturels ou synthétiques dont certains sont toxiques pour le foie. Parmi les principales substances toxiques on retrouve : 

  • Des plantes, des champignons, des moisissures, des levures
  • Des préparations végétales et herbes médicinales, en particulier des herbes chinoises
  • Des médicaments ((ex : paracétamol, certains antibiotiques, certains anti inflammatoires… etc)
  • Des compléments alimentaires ( à base de vitamines ou de plantes, dont certains sont contaminés par des substances ne devant pas s’y trouver)
  • Des métaux lourds (aluminium, arsenic, cadmium, plomb, mercure)
  • Des produits chimiques ménagers et environnementaux (ex : polluant de l’atmosphère, de l’eau, produits phytosanitaires, contaminants alimentaires)
  • L’alcool, certaines drogues
  • Certains virus (virus de l’hépatite A, B, C)
  • La surconsommation de certaines vitamines menant à des hypervitaminoses tel que la vit A
  • Les anabolisants utilisés chez les sportifs

 

En bref,  de nombreuses substances présentes dans des produits d’usage ou de consommation courante sont susceptibles d’être hépatotoxiques. La plupart de ces toxiques sont ingérés via l’eau et l’alimentation. Ils arrivent au foie en passant par la circulation sanguine via la veine porte qui draine la majeure partie des substrats absorbés par le tube digestif. 

Le foie est le principal organe impliqué dans le métabolisme des xénobiotiques (Un xénobiotique est une substance étrangère à l’organisme qui est capable d’interagir avec la cellule vivante). Il participe à la détoxication et à l’élimination de ces substances toxiques.

Les réactions métaboliques de détoxication hépatique impliquent la production et l’activité d’enzymes de transformation et de solubilisation de ces substances et nécessitent la présence d’eau pour en favoriser la solubilisation et l’élimination.  Les processus de détoxication produisent également des composés intermédiaires pro oxydant à l’origine d’un stress oxydatif et de lésions inflammatoires des tissus. 

 

Sources

  • Hartmut Jaeschke, Gregory J. Gores, Arthur I. Cederbaum, Jack A. Hinson, Dominique Pessayre, John J. Lemasters, Mécanismes d’hépatotoxicité, Toxicological Sciences , Volume 65, Numéro 2, Février 2002, Pages 166–176, https://doi.org/10.1093/toxsci/65.2.166Li, S.; Tan, H.-Y.; Wang, N.; Zhang, Z.-J.;
  • Lao, L.; Wong, C.-W.; Feng, Y. Le rôle du stress oxydatif et des antioxydants dans les maladies du foie. Int. J. Mol. Sci. 2015 , 16 , 26087-26124. https://doi.org/10.3390/ijms161125942

 

Les symptômes d’un foie intoxiqué ou malade 

L’exposition continue à la toxine peut entraîner une atteinte chronique irréversible de l’organe (ex : cirrhose) si celle- ci n’est pas interrompue.  

Les signes cliniques pouvant évoquer une hépatite toxique sont les mêmes que ceux de n’importe quelle forme de maladie hépatique aiguë ou chronique, comme l’hépatite virale ou l’obstruction des canaux biliaires (par des calculs biliaires). 

Parmi les symptômes évocateurs on peut retrouver : 

Fatigue, faiblesse, perte de poids, perte d’appétit, nausées, vomissements, fièvre, jaunisse/ictère, prurit, augmentation du volume du foie, voire fièvre ou douleurs abdominales.

Le diagnostic est établi par le médecin notamment à l’aide de tests sanguins témoins de la fonction hépatique par exemple : les enzymes hépatiques (ASAT, ALAT, GGT) les taux de prothrombine (TP), l’albumine et la bilirubine totale et conjuguée, phosphatase alcaline (PA).

NB : 

Il existe également d’autres maladies du foie telles que la stéatose hépatique (foie gras) ou Stéatohépatite non alcoolique associée à un foie souffrant d’une surcharge en graisses et  à des lésions des cellules du foie. Ces maladies de surcharge ne sont pas provoquées par l’exposition à des toxines mais elles sont associées au surpoids et à l’obésité, au diabète, l’hypertension, aux dyslipidémies. 

 

Sources 

  • https://www.fmcgastro.org/texte-postu/postu-2019-paris/toxicite-hepatique-des-complements-alimentaires/
  • https://www.merckmanuals.com/fr-ca/accueil/troubles-du-foie-et-de-la-v%C3%A9sicule-biliaire/manifestations-cliniques-des-maladies-du-foie/pr%C3%A9sentation-des-maladies-du-foie
  • https://www.liver.ca/fr/patients-caregivers/liver-diseases/lhepatite-toxique/
  • Foie toxique : mécanismes lésionnels et thérapeutiques pharmacologiques spécifiques- November 2007 – Réanimation 16(s 7–8) – DOI:10.1016/j.reaurg.2007.08.004
  • https://www.hug.ch/sites/interhug/files/structures/medecine_de_premier_recours/Strategies/strategie_tests_hepatiques.pdf

 

Qu’est ce que la “vraie detox”

Il est très difficile de mesurer réellement la charge d’exposition d’un individu à une toxine car les analyses réalisées sur l’urine, les cheveux ou le sang ne permettent de mesurer que les expositions les plus récentes à l’échelle du jour ou du mois. 

Il est des situations d’intoxication grave nécessitant une prise en charge médicale. Par exemple, en cas de surcharge en métaux lourds (cadmium, mercure, plomb, arsenic, aluminium…), d’empoisonnement ou de consommation excessive d’alcool, des interventions spécifiques peuvent être nécessaires qui n’ont rien à voir avec les cures détox commerciales. 

Dans ces situations, l’hospitalisation, l’usage de produits chélateurs qui capturent les toxiques et le suivi de leur élimination urinaire sont analysées. 

Si les agents chélateurs sont éliminés assez rapidement dans les urines (en quelques heures ou quelques jours), les éléments toxiques peuvent s’être accumulés sur de longues périodes et répartis dans divers compartiments corporels (sang, foie, reins…), tous n’étant pas également accessibles aux agents chélateurs (comme le tissu osseux, nerveux, ou adipeux qui stockent également les toxines). 

De plus, il n’est pas certain que les toxines chélatées par les chélateurs soient toutes excrétées dans les urines. La chélation impliquant la mobilisation des toxiques séquestrés dans les tissus vers la circulation sanguine dont certains seront redistribués vers d’autres tissus où ils continueront d’exercer leur effet toxique.

 

Source :

  • Sears ME. Chelation: harnessing and enhancing heavy metal detoxification–a review. ScientificWorldJournal. 2013 Apr 18;2013:219840. doi: 10.1155/2013/219840. PMID: 23690738; PMCID: PMC3654245.

 

Quelles sont les prétentions de ces cures detox ?

La cure detox a pour prétention de nous aider à nous purifier de l’intérieur et à éliminer les “toxines” accumulées dans notre corps, à stimuler le travail des organes d’épuration, à nettoyer un foie engorgé et fatigué par les toxines. Cette pratique aurait pour résultat d’améliorer la santé, de prévenir les maladies de l’hiver, d’être plus en forme ou de mieux digérer. 

Les cures sont souvent associées à la consommation de jus, de compléments alimentaires et/ou complétées par un régime alimentaire souvent restrictif. 

Toutefois rien n’est précisé quant aux toxines ciblées par ces cures et la recherche scientifique ne soutient pas l’efficacité clinique de la détox sur les être humains et n’apportent pas de preuves que “des toxines” sont réellement éliminées : en effet il n’y a aucun marqueur biologique mesurable dans le sang ou les urines qui permette de faire une analyse “avant et après la cure”.

Pour autant, certains usagers de ces cures témoignent se sentir mieux et soulagés après ces cures, alors quelle en est l’origine ? Il est difficile de savoir si ces sensations subjectives sont liées à un foie véritablement “désengorgé de ses toxines” , à la diète hypocalorique allégeant les processus de digestion ou un un simple, mais efficace, effet placebo. 

 

Source

  • Klein AV, Kiat H. Detox diets for toxin elimination and weight management: a critical review of the evidence. J Hum Nutr Diet. 2015 Dec;28(6):675-86. doi: 10.1111/jhn.12286. Epub 2014 Dec 18. PMID: 25522674.

 

 

COMMENT SOUTENIR LA FONCTION HÉPATIQUE et maintenir un foie en bonne santé sans cure detox

Bien que l’efficacité de la cure détox commerciale reste encore largement à démontrer, je conviens toutefois qu’il est important de maintenir un foie en bonne santé car c’est un organe charnière des processus métaboliques, de régulation de la glycémie, de la digestion, de la synthèse de protéines et lipides et de la fonction de détoxication…  

Les maladies touchant ou impliquant le foie sont fréquentes : le diabète, la NASH ou stéatose hépatique, la cirrhose, l’insuffisance hépatique (liées à l’alcool, aux médicaments…) etc.. en sont des exemples et malheureusement, à ce jour il n’existe pas de traitement efficace pour les maladies hépatiques. 

Par conséquent, la meilleure manière de protéger son foie consiste à le protéger en éliminant les alcools et les drogues, à éviter l’automédication ou la consommation de certaines plantes médicinales, à traiter les hépatites avec des médicaments antiviraux, et à adopter une alimentation et un mode de vie sains et à privilégier les produits bio. 

Rappelons également que le foie est naturellement capable de se détoxifier sans besoin de régimes ou de suppléments spécifiques, à condition de mener une vie saine. 

Voici les points clés d’une santé hépatique optimale : 

 

1/ Adopter une alimentation suffisante en protéines et calories 

L’efficacité des processus de détoxication est dépendante avant toute chose de l’état nutritionnel.

La dénutrition protéique entraine une souffrance du foie, une diminution du nombre de ses cellules et de son volume total ce qui réduit fortement ses fonctions. La malnutrition, l’anorexie, et en particulier l’insuffisance d’apport en protéines, en calories et autres micronutriments, les carences en vitamines  (C, A et E) et en minéraux (fer, cuivre, zinc et magnésium) affecte l’activité des enzymes de détoxication hépatique et réduit l’efficacité des fonctions de détoxication hépatique.  

 

Sources

  • Bidlack WR, Brown RC, Mohan C. Paramètres nutritionnels qui modifient le métabolisme hépatique des médicaments, leur conjugaison et leur toxicité. Actes de la Fédération. 1986 févr. ;45(2) : 142-148. PMID : 3510912.
  • Campbell TC. Nutrition and drug-metabolizing enzymes. Clin Pharmacol Ther. 1977 Nov;22(5 Pt 2):699-706. doi: 10.1002/cpt1977225part2699. PMID: 334439.
  • June 2017 DOI: 10.1016/j.nut.2017.02.010 Stereology shows that damaged liver recovers after protein refeeding

2/ Apporter une alimentation riche en antioxydants 

La détoxication hépatique conduit à la production de composés intermédiaires prooxydants générant un stress oxydant et provoquant d’autres dommages aux tissus hépatiques. 

Les antioxydants alimentaires neutralisent les radicaux libres libérés lors de ces réactions chimiques et protègent les cellules hépatiques contre le stress oxydatif. 

Parmi les antioxydants on retrouve des vitamines, des terpènes et des polyphénols. 

  • Les vitamines antioxydantes les plus connues sont : le ß-carotène (provitamines A), l’acide ascorbique (vitamine C), le tocophérol (vitamine E), 
  • Le terpène le plus connu est le lycopène (un autre caroténoide présent notamment dans la tomate)
  • Les polyphénols incluent les flavonoïdes (très répandus parmi les végétaux), les tanins (dans le cacao, le café, le thé, le raisin, etc.), les anthocyanes (notamment dans les fruits rouges), les acides phénoliques (dans les céréales, les fruits et les légumes), les catéchines (dans le thé vert)….

Rappelons aussi que la consommation excessive de compléments alimentaires et les hypervitaminoses peuvent être toxiques pour le foie. Sauf exception, on privilégiera donc les aliments riches en antioxydants au lieu de la supplémentation.

 

3/ Apporter des fibres alimentaires 

Les fibres présentes dans les fruits, les légumes, les légumineuses, et les grains entiers, les oléagineux aident à réguler le transit intestinal et à éliminer certaines toxines alimentaires dans les selles, réduisant ainsi la quantité de toxiques qui seront transportés vers le foie.

Les fibres, en modulant la santé du microbiome intestinal, contribue à entraîner une amélioration de la fonction barrière de l’intestin ce qui conduit à protéger le foie et les reins de la translocation de bactéries pro-inflammatoires et de produits bactériens nocifs.

 

Source

  • Kieffer, D. A., Martin, R. J., & Adams, S. H. (2016). Impact of dietary fibers on nutrient management and detoxification organs: gut, liver, and kidneys. Advances in Nutrition, 7(6), 1111-1121.

 

4/ Intégrer des aliments riches en soufre 

Les aliments comme l’ail, l’oignon, et les crucifères (brocoli, chou-fleur, chou) contiennent du soufre, un minéral essentiel au processus de détoxification hépatique, notamment dans la phase II de la détoxification où le foie transforme les toxines pour qu’elles puissent être éliminées. 

Des essais expérimentaux portant sur le traitement de la fibrose hépatique à l’aide de composés soufrés à dose pharmacologique sur les animaux semblent prometteurs. 

 

Sources

  • Milito, A.; Brancaccio, M.; D’Argenio, G.; Castellano, I. Composés soufrés naturels : une stratégie thérapeutique alternative contre la fibrose hépatique. Cells 2019 , 8 , 1356. https://doi.org/10.3390/cells8111356
  • Wu CC, Sheen LY, Chen HW, Kuo WW, Tsai SJ, Lii CK. Differential effects of garlic oil and its three major organosulfur components on the hepatic detoxification system in rats. J Agric Food Chem. 2002 Jan 16;50(2):378-83. doi: 10.1021/jf010937z. PMID: 11782211.

 

5/ Des Graisses saines 

Les processus de détoxication hépatique induisent un état inflammatoire délétère pour les tissus. 

Les acides gras oméga-3 sont des graisses aux propriétés anti inflammatoires. Ils sont présents dans les poissons gras (saumon, sardine, maquereau) et les graines de lin, de chia, l’huile de colza, les noix ou les amandes, peuvent réduire l’inflammation et donc contribuer à soutenir la fonction hépatique.

 

6/ Une hydratation adéquate

Le processus de détoxication implique une phase de solubilisation et d’excrétion des substances toxiques. 

Une bonne hydratation est donc essentielle pour faciliter la solubilisation puis l’élimination des toxines dans les urines via les reins. Le besoin hydrique quotidien est de 1.5l par jour (plus en cas de transpiration, fièvre, maladie..)

 

7/ Limitation/élimination de l’alcool et des substances toxiques alimentaires 

L’alcool est une cause majeure de stress hépatique et de maladies du foie (comme la stéatose hépatique ou cirrhose). Limiter la consommation d’alcool, ou l’éviter complètement, est crucial pour protéger le foie. 
Adopter une alimentation axée sur la consommation de produits issus de l’agriculture biologique permet de limiter l’exposition du foie aux produits phytosanitaires. 
Eliminer les fruits, légumes, céréales et autres aliments présentant des moisissures permet d’éviter la contamination par les mycotoxines. 

8/ Éviter les excès de médicaments et les produits chimiques

De nombreux médicaments, comme le paracétamol, sont métabolisés par le foie et peuvent causer des dommages en cas de surdosage ou d’utilisation prolongée. De nombreuses plantes sont également hépatotoxiques, et c’est également le cas de certaines utilisées en phytothérapie ou plantes de la pharmacopée chinoise ! 

Il est donc impératif de suivre les recommandations posologiques et éviter l’automédication ou l’accumulation de plusieurs compléments alimentaires.

De plus, minimiser l’exposition à d’autres toxines environnementales (tabac, polluants, produits chimiques) peut aider à réduire la charge toxique sur le foie. 

 

Source :

  • https://www.fmcgastro.org/postu-main/archives/postu-2005-paris/hepato-toxicite-de-la-phytotherapie/

 

9/ Plantes et compléments alimentaires

Il est important de considérer que “naturel” n’est pas sans risques ni effets secondaires et que l’usage de certaines plantes est associée à des lésions hépatiques. 

Une méta analyse de 2021 a permis de compiler les produits à base de plantes responsables de lésions du foie. Ont été impliqué et identifiés 79 produits à base de plantes et parmi ceux ci on peut citer : 

He-Shou-Wu (plante populaire chinoise), extrait de thé vert, Herbalife, kava kava, grande chélidoine, plusieurs herbes, germandrée, hydroxycut, scutellaire, kratom, Gynura segetum, garcinia cambogia, ma huang, chaparral, séné et aloe vera. 

Si toutefois certaines plantes semblent prometteuses quant à la protection des fonctions hépatiques, les résultats des données cliniques ne permettent pas d’apporter des preuves suffisamment solides pour recommander leur usage comme traitement. 

Une revue cochrane (le best of des métarevues de la littérature scientifique) portant sur l’usage de plantes médicinales dans la stéatose hépatique (maladie du foie gras) conclut à des effets positifs pour un grand nombre de plantes sur les réponses biochimiques et radiologiques mais également à des risques de biais importants et des résultats peu homogènes dans les différentes études analysées.

Les produits naturels les plus étudiés pour l’hépatoprotection sont la silymarine (chardon marie), le resvératrol, la curcumine et le gingko en raison de leur grande efficacité, de leur faible ou nulle toxicité et de leur disponibilité facile.

D’autres plantes telles que l’artichaut ou le radis noir sont très populaires pour “désengorger le foie”. Ces 2 dernières plantes ont en réalité des propriétés cholérétiques et/ou cholagogues c’est à dire qu’elles favorisent la production de bile par le foie et son excrétion dans l’intestin par l’intermédiaire de la vésicule biliaire. Ces propriétés sont dues à leur concentration en polyphénols.

Tout défaut de formation, de sécrétion ou d’écoulement de la bile peut entraîner l’accumulation de molécules hautement cytotoxiques dans les hépatocytes et donner lieu à une cholestase toxique pour les tissus du foie. L’une des principales approches thérapeutiques dans le traitement de la cholestase consiste à augmenter le flux biliaire (effet cholérétique) et à excréter l’excès de bile par les selles (effet cholagogue). 

 

Sources :

  • https://dictionnaire.acadpharm.org/w/Chol%C3%A9r%C3%A9tique
  • Mohagheghzadeh, A.; Badr, P.; Mohagheghzadeh, A.; Hemmati, S. Hypericum perforatum L. et les mécanismes moléculaires sous-jacents de ses propriétés cholérétiques, cholagogues et régénératrices. Produits pharmaceutiques 2023 , 16 , 887. https://doi.org/10.3390/ph16060887
  • Barillari, J., Cervellati, R., Costa, S., Guerra, M. C., Speroni, E., Utan, A., & Iori, R. (2006). Antioxidant and choleretic properties of Raphanus sativus L. sprout (Kaiware Daikon) extract. Journal of agricultural and food chemistry, 54(26), 9773-9778.

 

Exemple du Chardon-Marie (Silybum marianum)  

Cette plante est utilisée depuis plus de 2000 ans pour traiter diverses pathologies. Il a été particulièrement utilisé pour traiter les maladies liées au foie et à la vésicule biliaire. Le silymarine, un composé actif du chardon-Marie, est un antioxydant puissant qui protège les cellules hépatiques contre les dommages et favorise la régénération hépatique. Son usage semble être sûr et non toxique. Bien que des études suggèrent des effets protecteurs, son usage doit être discuté avec un professionnel de santé, notamment pour éviter les interactions avec des médicaments. 

Si elle peut potentiellement être utile en prévention, une revue et métaanalyse conclut à aucun effet clinique, histologique ou biochimique de son utilisation chez les patients atteints de maladie hépatique chronique. 

 

Sources 

  • Bradly P Jacobs, Cathi Dennehy, Gilbert Ramirez, Jodi Sapp, Valerie A Lawrence, Milk thistle for the treatment of liver disease: A systematic review and meta-analysis, The American Journal of Medicine,Volume 113, Issue 6,2002,Pages 506-515,ISSN 0002-9343, https://doi.org/10.1016/S0002-9343(02)01244-5.
  • Ballotin VR, Bigarella LG, Brandão ABM, Balbinot RA, Balbinot SS, Soldera J. Herb-induced liver injury: Systematic review and meta-analysis. World J Clin Cases. 2021 Jul 16;9(20):5490-5513. doi: 10.12998/wjcc.v9.i20.5490. PMID: 34307603; PMCID: PMC8281430.
  • Liu ZL, Xie LZ, Zhu J, Li GQ, Grant SJ, Liu JP. Herbal medicines for fatty liver diseases. Cochrane Database Syst Rev. 2013 Aug 24;(8):CD009059. doi: 10.1002/14651858.CD009059.pub2. PMID: 23975682.
  • https://www.frontiersin.org/journals/physiology/articles/10.3389/fphys.2015.00363/full
  • https://www.fmcgastro.org/texte-postu/postu-2019-paris/toxicite-hepatique-des-complements-alimentaires/

 

Exemple du radis noir (Raphanus sativus) :

Le radis noir est couramment utilisé en phytothérapie pour ses propriétés “dépuratives et détoxifiantes”. Le radis est avec le chou une plante de la famille des crucifères, riche en glucosinolates qui sont des composés soufrés. Il présente également une forte concentration de composés phénoliques antioxydants.

La littérature scientifique sur le sujet met en évidence des effets hépatoprotecteurs chez le rat. Il est donc tout à fait présomptueux d’élargir ces effets chez les homme. 

 

Sources :

  • Zarei, Mohammad Hadi 1,✉ ; Akbulout, Sami 2 ; Zafari, Maryam 3 ; Saghaei, Elham 4 ; Lorigooini, Zahra 1 ; Khoei, Hossein Amini 1 ; Khosravi, Somayé 5 ; Bijad, Elham 1. L’extrait de racine de radis noir atténue les lésions hépatiques induites par le valproate de sodium en inhibant l’effondrement du potentiel de la membrane mitochondriale et le stress oxydatif chez la souris. Revue de biomédecine tropicale de l’Asie-Pacifique 14(7):p 298-306, juillet 2024. | DOI: 10.4103/apjtb.apjtb_195_24
  • Manivannan, A.; Kim, J.-H.; Kim, D.-S.; Lee, E.-S.; Lee, H.-E. Décrypter le potentiel nutraceutique de Raphanus sativus — Un aperçu complet. Nutrients 2019 , 11 , 402. https://doi.org/10.3390/nu11020402

9/ Gestion du poids et activité physique 

Un excès de poids, en particulier l’accumulation de graisse abdominale, est favorable à la stéatose hépatique (ou foie gras), une condition où trop de graisse s’accumule anormalement dans le foie, au lieu d’être stocké dans le tissus adipeux. 

Cette graisse abdominale est favorable à l’insulinorésistance hépatique, à l’origine de dérégulation des métabolismes glucidiques et lipidiques à l’origine du diabète. 

Une alimentation saine couplée à l’activité physique régulière aide non seulement à maintenir un poids santé mais aussi à améliorer la sensibilité à l’insuline, réduisant ainsi le risque de stéatose hépatique.

 

Source 

  • Hernandez-Rodas, MC; Valenzuela, R.; Videla, LA Aspects pertinents des interventions nutritionnelles et diététiques dans la stéatose hépatique non alcoolique. Int. J. Mol. Sci. 2015 , 16 , 25168-25198. https://doi.org/10.3390/ijms161025168

 

 

Conclusion générale 

Bien que les régimes de détoxification soient populaires et que les pratiquant en ressentent un vrai mieux être, il n’y a pas suffisamment de preuves scientifiques pour soutenir leur efficacité en matière d’élimination des toxines. 

Pour soutenir le travail hépatique et la détoxification naturelle du corps, il est préférable de se concentrer sur une alimentation équilibrée et saine, sans alcool ni tabac, sans automédication abusive, plutôt que sur des régimes de détoxification extrêmes ou non éprouvés.

La nutrition joue un rôle clé dans le soutien de la fonction hépatique et la prévention des maladies du foie. Une alimentation équilibrée, riche en eau, en fibres, en composés antioxydants, composés soufrés, riche en vitamines, bio est bénéfique pour cet organe et la santé générale. Et à ce jour il n’existe pas de traitement médicamenteux et encore moins de compléments alimentaires ou de traitement de phytothérapie pour soigner un foie déjà malade. 

Les régimes de restriction ne sont pas utiles pour maintenir une bonne fonction hépatique, au contraire, car la production des enzymes de détoxications requiert une nutrition équilibrée suffisante en protéines, énergie et micronutriments. 

Quant à l’usage des plantes, si certaines sont toxiques pour le foie, d’autres semblent prometteuses pour soutenir ses fonctions, bien que la littérature scientifique actuelle peine à valider leur effet thérapeutique chez l’homme.

NB : Pour compléter cet article, je vous invite à lire également mon premier article “citron detox”

 

 

Article rédigé par Katia Tardieu, diététicienne nutritionniste

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